(Extrait des Clés pour le judo de Jérémie.)
Ceci est la disposition traditionnelle du dōjō (道場 « lieu [où on étudie] la voie ») 1 le plus couramment décrite. Elle est très rare dans le monde du jūdō, ça peut en fait varier fortement, chaque discipline, voire chaque dōjō est libre de définir ses propres règles, comme tu le remarqueras chez nous. Lorsque tu arrives dans un dōjō, observe ou demande comment ça se passe pour ne pas commettre de maladresse. Ça fait partie du reigi.
Lorsqu’on entre, on fait face au shōmen (正面 « façade », côté principal) où se trouve le kamiza (上座 « siège haut », place d’honneur), avec généralement le portrait du fondateur ou des maîtres de l’école, des armes ou parfois un autel bouddhiste ou shintō. On leur rend hommage en saluant dans cette direction chaque fois qu’on entre et qu’on sort. Il faut éviter autant que possible de tourner le dos au kamiza. La pointe et le tranchant des armes ne peuvent jamais être orientés dans sa direction.
Plus on est ancien dans le dōjō, plus on se rapproche du kamiza. C’est donc la place du sensei, tandis que les deshi sont au shimoza (下座 « siège bas »). Les kōhai sont à la droite du sensei, vers shimoseki (下席 « place basse »), les sempai sont à sa gauche, vers jōseki (上席 « place haute »). Selon la tradition, les invités (pratiquants extérieurs) se trouvent tout à fait à droite, au shimoseki, et font face aux assistants (les sempai les plus anciens) placés tout à fait à gauche, au jōseki. 2 Lorsqu’on reçoit un invité de marque (maître du maître, visiteur officiel, etc.), il prend place au kamiza. Le professeur se place alors parfois au jōseki.
Tout cela vaut pour les temps de salut, d’explications, de démonstrations, de pause. Le salut se fait toujours en seiza ; dans les autres moments, certains dōjō exigent de s’installer en seiza, d’autres qu’on reste debout.
La pratique se passe sur la surface centrale, l’embujō (演武場), « lieu de pratique martiale ».
En pratique :
- alors que selon la règle traditionnelle, une seule personne (le sensei responsable du cours, éventuellement un invité d’honneur) se trouve au kamiza, au jūdō, on admet volontiers que plusieurs personnes y soient alignées
- s’il y a beaucoup de monde et en fonction de la place disponible, soit on fait plusieurs rangs (les sempai devant, les kōhai derrière), soit, comme dans la plupart des dōjō de jūdō en Belgique, on préfère une seule ligne débordant côté jōseki et côté shimoseki.
Le dōjō ne désigne pas qu’un lieu de pratique des arts martiaux : il peut s’agir d’un temple bouddhiste ou shintō. C’est un lieu consacré.↩
La légende raconte que c’est une question de confiance héritée de l’époque des rivalités meurtrières. Le maître gardait les invités et les nouveaux à sa droite (le côté où il pouvait dégainer son arme le plus facilement ?) pour les avoir à l’œil. S’ils décidaient de l’attaquer, les élèves devaient le protéger : les assistants, en face, les surveillaient pour réagir au moindre soupçon, tandis que les débutants étaient en première ligne pour ralentir la progression des attaquants et laisser le temps aux anciens d’agir plus efficacement. C’est pour la même raison que le professeur se place à l’opposé de l’entrée : il voit tout de suite qui rentre et ses élèves sont sur le passage. Quand l’entrée se trouve à droite (parfois on n’a pas le choix, la priorité est que le kamiza soit du côté nord ou du côté qui le valorise le mieux), c’est la même logique. Il arrive que l’entrée se trouve au jōseki et que l’ordre soit inversé : les kōhai à gauche du professeur, les sempai à droite.↩